vendredi 19 mars 2010

The Ghost Writer – Roman Polanski


A défaut de pouvoir sortir de prison, Polanski sort un film : The Ghost Writer. L’occasion pour le cinéaste de faire parler de lui autrement que par son procès, avec un thriller sombre et palpitant qui vaut le détour.



C’est l’histoire d’un écrivain mort dans d’étranges conditions alors qu’il était chargé d’écrire la biographie d’un ministre britannique. Ou plutôt c’est l’histoire de son fantôme, dont l’ombre plane sur le nègre engagé pour le remplacer. C’est aussi l’histoire d’une île isolée où il pleut tout le temps. C’est une histoire d’une vieille photo, d’un numéro de téléphone, d’un complot politique, d’une promenade dans les dunes, de la lumière d’un phare qui tournoie dans le noir et d’un manuscrit qui détient la clé du mystère. Les ingrédients parfaits pour un thriller classique, genre que Polanski sublime par sa noirceur, une pointe d’ironie et une certaine poésie.
Au casting, Ewan McGregor est excellent en écrivain doué du flegme britannique, même si on le préfère dans des rôles plus « rock » (Trainspotting, Petit meurtre entre amis, Velvet Goldmine), tandis que le costume de politicien véreux grisonnant sied presque aussi bien à Pierce Brosnan que celui plus flatteur de James Bond.
Plongé au cœur d’un conflit politique malgré lui, le personnage principal, un « ghost writer » joué par McGregor, est appelé à prendre la place de son prédécesseur pour éclaircir le mystère qui entoure sa mort et le passé du ministre dont il doit écrire la biographie.
Le scénario s’en prend aux magouilles politiques, à la CIA et à la lutte anti-terrorisme. Normal me direz-vous pour un mec persécuté par la justice américaine depuis plus de trente ans. Oui mais voilà, plus que de dénoncer les abus des USA, Polanski rend aussi hommage à une certaine culture américaine, celle des films noirs hollywoodiens des années 30, d’où son film semble largement inspiré. On sent également que l’œuvre est adaptée d’un livre, avec une atmosphère sombre et chargée d’humidité qui fait très roman policier et qui se condense parfois à l’écran en quelques plans magistraux. C’est d’ailleurs surtout cette impression oppressante d’un personnage de plus en plus pris dans un piège dont il ne comprend pas tous les mécanismes qui frappe le spectateur, que Polanski embarque sur un bateau à travers la brume vers des terres sauvages à la quête d’un passé mystérieux. On se laisse engloutir par ce film à l’intrigue coriace, pour en ressortir plongé dans nos réflexions à la suite de la révélation finale.

Finalement, Polanski trouve en ce film un bien meilleur défenseur que le pathétique Yann Moix (joliment démonté chez Ruquier ici). L’auteur s’essaie à un genre éculé sans tomber dans le déjà vu, ni vraiment sombrer dans la théorie du complot. Par The Ghost Writer, Polanski confirme qu’il est avant tout un grand réalisateur.

A voir : The Ghost Writer de Roman Polanski, ainsi que l’intégrale de son œuvre actuellement diffusée à la cinémathèque suisse.

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